Cyprien Gaillard au Centre Pompidou du 21 septembre 2011 au 9 janvier 2012

A peine plus de 30 ans et déjà le prix Marcel Duchamp 2010 en poche, Cyprien Gaillard en agace plus d’un dans le milieu de l’art contemporain. Jeune, un peu « people », plutôt « beaugosse » et ne résidant pas en France, il n’en faut pas plus pour que certains crient au scandale. Autant de caractéristiques qui ne collent pas avec le mythe de l’artiste maudit, seul, et qui connait une reconnaissance trop tardive.

C’est donc un artiste un peu atypique que le Centre Pompidou accueille à l’Espace 315. Le visiteur ne verra pas là une installation ou une exposition réalisée spécifiquement pour le Centre mais une sélection parmi quelques un des 900 polaroïds qui composent Geographical Analogies et qui fut déjà présentée lors de la FIAC l’année dernière. Un parti pris peu téméraire mais qui rend le travail de Cyprien Gaillard très accessible.

UR, Underground Resistance and Urban Renewal, 2011, sérigraphies sur verre et marbre fossile noir, 241 x 246,5 cm chaque, © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris
UR, Underground Resistance and Urban Renewal, 2011, sérigraphies sur verre et marbre fossile noir, 241 x 246,5 cm chaque, © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris

L’exposition s’ouvre sur deux grandes plaques où sont inscrites les lettres U et R. Deux vestiges comme les affectionne l’artiste. La lettre R est inscrite sur une plaque de marbre qui vient de Tunisie alors que la lettre U, sérigraphiée sur du verre, vient du Forum des Halles. Deux lieux, deux matériaux, deux époques qui n’auraient jamais du se rencontrer et pourtant un dialogue se crée. A cela s’ajoute une double (ou une multiple) signification, Underground Resistance and Urban Renewal selon le cartel. Et pourquoi pas UR comme le nom du plus ancien continent formé ? De la plus ancienne et importante ville de la Mésopotamie Antique ? Ou encore Under Ruins ? A chacun de choisir, ou d’inventer, les significations de ces abréviations. Mais le ton est donné.

Cyprien Gaillard photographie des endroits, connus ou non, avec un Polaroïd. Une réflexion sur la ruine, le temps qui passe, l’archéologie, la conservation, la place de l’homme…une sorte de néo-romantisme post 11 septembre. Des lieux détruits, ravagés par les hommes ou simplement abimés par le temps. Le cadrage est systématiquement en biais. Les polaroïds sont assemblés par 9, en losange, et présentés dans des vitrines comme autant d’objets d’un cabinet de curiosités contemporain. Pas de cartels ni de parcours imposé. Le visiteur peut passer de l’une à l’autre, dans un sens ou dans un autre aussi librement que l’artiste assemble ses images.

Geographical Analogies, 2006-2011, mixed media, 65 x 48 x 10 cm (avec cadre), 25 5/8 x 19 x 4 inches (sans cadre), © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris/Sprüth Magers, Berlin London/Laura Bartlett Gallery, London
Geographical Analogies, 2006-2011, mixed media, 65 x 48 x 10 cm (avec cadre), 25 5/8 x 19 x 4 inches (sans cadre), © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris/Sprüth Magers, Berlin London/Laura Bartlett Gallery, London

Les analogies sont parfois évidentes entre les différents lieux photographiés. Analogies de formes et de lignes la plupart du temps, avec un « motif central » qui répond à certains qui le jouxtent, par 2 ou par quatre. Analogies de sujets (des temples, des usines, des immeubles, des arbres) parfois éloignés dans l’histoire et géographiquement mais liés ici grâce à un même support par nature éphémère, le polaroïd. L’impermanence des lieux en voie de disparition et l’impermanence du support, la boucle est bouclée. Un travail cohérent, à la rigueur presque mathématique et qui exclu l’homme, absent de tous ces clichés, qui devient alors spectateur de sa propre histoire. Presque la chronique d’une fin annoncée.

Geographical Analogies, 2006 - 2011, mixed media, 65 x 48 x 10 cm (avec cadre), 25 5/8 x 19 x 4 inches (sans cadre), © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris/Sprüth Magers, Berlin London/Laura Bartlett Gallery, London
Geographical Analogies, 2006 – 2011, mixed media, 65 x 48 x 10 cm (avec cadre), 25 5/8 x 19 x 4 inches (sans cadre), © Cyprien Gaillard, Courtesy Galerie Bugada & Cargnel, Paris/Sprüth Magers, Berlin London/Laura Bartlett Gallery, London

Au centre de la pièce sont présentées des structures de métal trouvées au Pérou qui servent à l’origine de présentoirs à enjoliveurs. Vert, jaune, rouge…des lignes en biais, encore, comme un écho aux polaroïds. Exposés tels des œuvres d’art, avatars d’une société de consommation, Cyprien Gaillard joue une fois encore avec les rapprochements anachroniques.

Mais en cherchant bien, il existe une figure humaine. Figée pour l’éternité sur un fragment de bas-relief, la Tête d’un tributaire Mède (vers 710 – 706 av. J. -C., Musée du Louvre) sourit. Tout n’est peut-être pas aussi tragique finalement, l’instinct de conservation et de préservation est toujours là.

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