Voici un coup de cœur pour ce 41ème festival de la bande dessinée d’Angoulême : Violette Nozière, Vilaine chérie. Sorti le 15 janvier, cet album est le premier publié par Eddy Simon et Camille Benyamina aux éditions Casterman.
Violette est une criminelle, du genre qui défraie la chronique. Issue d’un milieu populaire, elle rêvait d’une autre existence. Mais, refusant le travail et les études, elle préférera la vie facile. Prostitution, fêtes, mais aussi mensonges, manipulation et vol de ses propres parents, jusqu’au point de non-retour : elle finit par les empoisonner.
Fait divers scandaleux, le crime de Violette Nozière a secoué la France des années trente, et son procès retentissant est resté l’une des plus célèbres affaires judiciaires de l’époque. Son histoire a été reprise de nombreuses fois notamment par la littérature avec les surréalistes ou par le cinéma comme dans le film éponyme de Chabrol.
Mais si les faits sont simples, l’explication d’un tel crime pose une question essentielle: qu’est-ce qui pousse une jeune fille, qui avait beaucoup d’atouts, à perdre pied, à s’enfoncer dans le mensonge pour finalement passer à l’acte ?
C’est donc à la personnalité, à la psychologie de Violette qu’ont choisi de s’attaquer Eddy Simon au scénario et Camille Benyamina au dessin, dans cette histoire qui retrace le parcours de Violette l’année qui précède son crime.
Autant le dire tout de suite, cet album est une très belle réussite. Tant au niveau de l’intrigue qui éclaire ce fait divers de manière nouvelle qu’au niveau du dessin qui est une petite merveille.
Ce qui vous attirera immédiatement chez Violette, si vous la croisez par hasard, ceux seront ses yeux : tout simplement magnifiques et pleins de promesses. Même s’ils regarderont par-dessus votre épaule, l’air froid, déterminé et calculateur, vous devinerez la fragilité qui se cache derrière. Ainsi se présente la couverture, superbe, qui vous donnera l’irrésistible envie de plonger dans l’album.
Le dessin, qui a nécessité deux ans de travail, est impressionnant de maîtrise que ce soit les personnages, le rendu des ombres et lumières, des scènes extérieures, voir la reconstitution du Paris des années 30 ou encore la superbe plongée sur le tribunal, comme intérieures. Une mention spéciale pour Violette qui sous le trait léger de Camille devient tantôt jeune fille sage, tantôt femme fatale, tantôt à la grâce lumineuse, tantôt assombrie par ses mensonges. La dessinatrice, par la douceur de son trait, redonne vie et âme à cette héroïne pétrie de contradiction, dans ce qui s’annonce comme l’une des plus belles sorties de ce début d’année.
Pour un premier album, c’est un coup de maître, Camille Benyamina est une dessinatrice à l’immense talent et il y fort à parier que cette bande dessinée n’est que la première d’une longue série.
Hadrien Gandon