La libération des camps de Patrice Gélinet

 C’était La libération des camps photoen 1945, il y a seulement soixante dix ans. L’Europe sortait tout juste d’un conflit mondial sans précédent. L’heure du bilan et de la reconstruction a sonné. On se met à rêver de paix, d’alliances nouvelles, et même d’une intégration européenne qui rapprocherait des nations anciennement ennemies. Cependant, si le 8 mai 1945 l’Allemagne nazie capitule face aux forces alliées, l’horreur de la guerre n’est pas terminée. Elle se révèle même davantage en cette année 1945 puisque le monde découvre avec stupéfaction les camps de la mort, dans lesquels plusieurs millions de Tziganes, de Juifs, de prisonniers, de résistants, de personnes handicapés et d’homosexuels furent exterminés.

Dans cet ouvrage – qui est une retranscription organisée d’une émission diffusée sur France culture – Patrice Gélinet redonne la parole à celles et ceux qui furent les témoins forcés du projet mortifère nazi.

La nécessité de dire l’histoire

C’est un objet d’histoire sans filtre que nous livre Patrice Gélinet. Sa plume se fait discrète pour laisser le champ libre aux multiples confessions des différents acteurs interrogés. L’objectif de ce livre est de faire entendre les voix de ceux qui ont vécu ce drame. Soit parce qu’ils en furent eux même les victimes, soit parce qu’ils assistèrent à la libération des camps. Les témoignages poignants, saisissants, et historiquement précieux se succèdent. Tous soulignent la nécessité de dire l’horreur, et en même temps l’incapacité des mots à retranscrire l’intensité aiguë du malheur. Quiconque tente de décrire l’horreur se heurte à de l’insoutenable, et partant à de l’indicible. Les mots employés sont toujours en deça de la réalité. Mais malgré tout, et c’est ce que nous apprend cet ouvrage, ils doivent être dits. Autrement dit, si les témoins de l’histoire que les lecteurs rencontrent au fils des pages ont expérimenté la difficile mise en mots du tragique, ils connaissent surtout la dangerosité du silence. 

Rappels historiques et questions soulevées 

Au delà des témoignages clés que ce livre nous permet de découvrir, l’auteur rappelle le contexte qui présida à la découverte des camps. Comment les a-t-on découverts? Qui étaient les ”libérateurs”? Dans quel état les a-t-on trouvés? Comment s’est réellement passée la libération des prisonniers? Les populations habitant près d’Auchwitz et de Dachau pouvaient-elles ignorer ce qu’il s’y passait? On comprend dès lors très vite que le mot ”libération” recouvre en vérité des réalités multiples et bien plus complexes que ne le suggère, de prime abord, l’apparente limpidité du mot. S’il y a des camps, il y a aussi des libérations. De même, s’il s’agissait de recouvrer une liberté tant espérée, celle-ci ne se fit pas sans heurts ni sans approximations. 

A une version un peu trop édulcorée niant la réalité historique, on préférera donc ce rétablissement des faits, énoncés par des voix qui rappellent leur droit à la mémoire. Moins éphémère qu’une émission de radio, l’écriture confère ainsi à leurs paroles une sorte d’éternité mémorielle. La libération des camps est un livre d’histoire qui donne la parole à ses acteurs et qui permet de comprendre, sous un angle à la fois intime et collectif, que 1945 est aussi le début d’une guerre contre l’oubli.

 

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