Ritwik Gathak, même cachée, une étoile brille toujours

Il y avait foule devant les locaux de la cinémathèque française ce Mercredi 1er Juin. Pour cause, la projection inaugurale de la rétrospective Ritwik Gathak. Ce cinéaste bengalais mort en 1976 est en effet actuellement mis à l’honneur par la cinémathèque française, et ce à l’occasion de la sortie du premier livre français dédié à cette sommité du cinéma aux éditions de l’arachnéen. Sandra Alvarez de Toledo, éditrice du livre, distinguait dans son mot d’ouverture, Gathak des cinéastes ordinaires par le fait qu’il soit un artiste. “Chez lui, la poésie, comme travail des formes, et l’histoire sont inséparables”. Le meilleur film à retranscrire cela est sans nul doute L’Etoile cachée, sélectionné pour l’ouverture de cette rétrospective.

 

 

Bien que son œuvre soit connue pour sa diversité, mêlant mélodramatique et burlesque, les films de Gathak vous laissent toujours la même impression d’inachevé et d’inaccompli. Ils sont en cela le reflet même de la société qu’il essaye de retranscrire, une société en cours de construction, avec une population qui est elle même en questionnement sans pouvoir apporter de réponses. L’inachevé c’est également la caractéristique clé de la vie de Gathak, mort d’une tuberculose dans la plus grande pauvreté, au bout d’une carrière quantitativement réduite (seulement 8 longs-métrages) et qualitativement “sinueuse, faite d’échec commerciaux et d’incompréhension” comme il a été rappelé dans le mot d’ouverture donné hier soir. Pour son œuvre, point de reconnaissance internationale. Elle ne s’impose que de manière très tardive en Europe occidentale et même en Inde. Pourtant, les influences qui sont les siennes puisent leurs racines en Europe même notamment dans le théâtre brechtien, et l’impact qu’il eu sur le cinéma indien s’est prolongé sur plus de deux générations.

 

L’Etoile Cachée est l’histoire d’une famille de la classe moyenne Bengali qui vient s’installer en réfugiés à Calcutta, inaugurant ainsi une véritable descente aux enfers. Nita, aînée d’une fratrie de quatre se trouve alors dans l’obligation de travailler plutôt que de poursuivre des études et ce afin de subvenir aux besoins de sa famille. Elle se néglige, oublie ses rêves, et délaisse ses aspirations. Elle se laisse voiler par les nuages de la réalité immédiate. “Nita est Sindibad le marin”: tout le monde dépend de et compte sur elle, personne ne croit en son droit à l’accomplissement personnel. Pour sa part, elle attend le jour où ses cadets pourront voler de leurs propres ailes comme le jour de sa salvation. Lorsque ce jour là arrive, elle se trouve enterrée dans un abysse dont elle n’entrevoit point de sortie. Elle confesse son péché: celui de s’être soumise à l’injustice, et en paye le prix. Elle rêvait de quelqu’un qui la “mettrait à l’abri, sous une cloche de verre, comme une poupée de cire”. Il était pour cela aussi trop tard.

 

L’Etoile Cachée est reconnu comme le meilleur film de Ghatak. Ephémère, il trace le portrait de la précarité de la classe d’appartenance de l’auteur. Il relève aussi sur un ton mélodramatique les problématiques d’un pays jeune, perdu entre les aspirations du futur et le poids de la réalité qui vient relativiser aussi bien les réussites que les échecs. L’Etoile Cachée paru en 1960 est la production qui porte le plus en elle le “moi” de Gathak. Au delà même des personnages, la structure elle-même révèle la sensibilité du cinéaste. Dans ce film, vous trouverez tout d’un film indien, mais aussi des bribes du théâtre brechtien, des éléments cinématographiques nouveaux et déracinés, en somme tout ce qui distingue l’œuvre de Gathak. L’Etoile Cachée donne le la d’une rétrospective truffé d’inattendus où le spectateur est appelé à aller par delà les incompréhensions qu’a suscitées une œuvre marginale pour certains, chercher les germes d’un lyrisme avant-gardiste et d’une poésie prégnante.  La cinémathèque française nous invite là à découvrir le travail d’une étoile du cinéma indien, qui même cachée, n’a pas cessé de briller.

 

NB. La programmation complète de la retrospective est disponible sur
http://www.cinematheque.fr/fr/dans-salles/hommages-retrospectives/fiche-cycle/ritwik-ghatak,333.html

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