Succès pour “GURU”, l’opéra contemporain mis en scène par Muriel Mayette-Holtz

Pour sa première mise en scène d’un opéra, Muriel Mayette-Holtz, directrice du Théâtre National de Nice, s’est emparée d’un opéra contemporain composé par Laurent Petitgirard. Pas de suspense inutile : ce projet ambitieux, en partenariat avec l’Opéra Nice Côte d’Azur, est une incontestable réussite. Les trois représentations de Guru qui se sont tenues à La Cuisine ont été longuement ovationnées par le public, qui se souviendra sûrement longtemps de l’histoire de cette secte et de son dangereux gourou.

GURU plonge les spectateurs au coeur d’une secte

Avec GURU, c’est l’Opéra qui vient au théâtre, à moins que ce ne soit le contraire. Peu importe : en tous cas, les deux étaient faits pour s’unir. Pour mettre en scène cet opéra contemporain qui nous plonge au coeur d’une secte, il a fallu réorganiser la disposition du plateau  de La Cuisine. L’Orchestre Philharmonique de Nice est disposé au fond tandis que les chanteurs et le choeur de l’Opéra de Nice évoluent à l’avant-scène, à proximité des spectateurs du premier rang. Pas de décor majestueux mais seulement un immense écran où sont projetées des images de la mer et parfois celles de ce gourou narcissique. Sur scène, quelques herbes, du sable et un petit point d’eau sont également là pour rappeler que l’histoire à laquelle nous allons assister se déroule sur une île. En effet, c’est là que vivent les membres d’une secte dirigée par un homme dangereux et manipulateur, Guru. Cet opéra contemporain chanté en français est relativement court.  Deux heures intenses au cours desquelles les spectateurs éprouvent les sentiments propres à la tragédie antique : la terreur et la pitié.

Une tension très forte

Lorsqu’on voit arriver sur scène le charismatique Guru (interprété magistralement par le baryton Armando Noguera) dont les paroles sont instantanément reprises en choeur par ses adeptes aveuglés, on devine que l’issue de cette histoire sera fatale. S’il y avait le moindre doute, il est aussitôt levé lorsqu’on apprend que cet opéra est inspiré du drame que connurent les membres d’une secte aux Etats-Unis, à la fin des années 70 : plus de de 900 personnes moururent dans un suicide collectif impulsé par un gourou. Jusqu’au dénouement tragique de l’opéra, la tension ne cessera de monter, jusqu’à créer un certain malaise chez les spectateurs, rendu d’autant plus fort qu’ils sont très proches de la scène, assistant impuissants au drame qui se joue sous leurs yeux. Muriel Mayette-Holtz a choisi un dispositif scénique théâtral, qui s’avère particulièrement adapté au propos de cet opéra qui plonge au coeur du mécanisme de l’emprise et de la manipulation mentale. Les adeptes de Guru appliquent aveuglément ses ordres : reclus sur une île déserte, ils se nourrissent uniquement d’eau salée. Le bébé né de l’union entre Guru et Iris (bouleversante Anaïs Constans), une membre de la secte, a droit au même traitement. La scène où apparaît un poupon particulièrement réaliste dans un berceau relié à une perfusion qu’on devine remplie d’eau de mer est glaçante. Le bébé est en train de mourir et cela semble ne perturber (presque) personne.  Marie (Sonia Petrovna), une adepte de la secte arrivée récemment, tente de faire réagir les autres face au drame mais il est trop tard. Le bébé meurt et suivra Iris, inconsolable. C’est à elle que l’on doit les scènes les plus émouvantes du spectacle.

Pendant près de deux heures, Marie va s’efforcer de détruire Guru : ce sont les mots qu’elle prononce la première fois qu’elle lui adresse la parole. Elle ne chantera pas pendant toute la représentation. Comme isolée des autres, elle parle, et, telle une Cassandre des temps modernes, avertira des dangers et tentera de ramener les adeptes à la raison. En vain. La tragédie doit accomplir son destin funeste, orchestré par ce gourou machiavélique dont la folie ne cesse de grandir, si bien qu’à la fin, lorsque résonne le cri déchirant de Marie, les spectateurs auraient envie de faire comme elle, abasourdis devant une telle horreur.

A propos Laurence

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Un commentaire

  1. #EspritCritique es tu là?
    Excellente nouvelle pour la formation à l’esprit critique des lycéens.
    Il serait temps.
    Pourriez vous nous contacter svp
    Merci

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