Le Festival de Cannes s’est achevé samedi dernier. De l’avis de tous, cette 72e édition a tenu toutes ses promesses. Les « nouveaux », comme Ladj Ly et son film coup de poing Les Misérables ou Mati Diop avec son poétique Atlantique, ont créé la surprise et ont séduit le jury qui leur ont décerné des prix. Quant aux « anciens » et habitués du Festival, ils n’ont pas déçu en présentant des films parfois flamboyants, tels Pedro Almodovar avec Douleur et gloire ou Terrence Malick avec le magnifique Une vie cachée.
Lors de la conférence de presse de présentation du festival, Thierry Frémaux avait présenté cette édition comme « politique » et « poétique ». En effet, de nombreux cinéastes ont dressé un état des lieux et ont montré la société dans laquelle nous vivons. Ladj Ly avec Les Misérables tire la sonnette d’alarme en montrant la situation explosive dans les banlieues. Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles ont filmé un Brésil en proie à une très grande violence dans Bacurau. Ken Loach, toujours en colère, avec Sorry we missed you, fait le portrait d’un homme happé par le travail et par un employeur qui lui en demande toujours plus. Mati Diop, l’une des grandes révélations de cette édition, évoque dans un son poétique Atlantique, la situation des migrants. Les frères Dardenne avec Le jeune Ahmed se sont attaqués à la radicalisation en suivant un jeune adolescent, qui oscille entre la vie et le passage à l’acte. Le réalisateur palestinien Elia Suleiman, se met en scène dans It must be heaven et s’ interroge sur la notion d’identité. Quant à Bong Joon Ho qui a remporté la Palme, il montre les inégalités sociales de son pays dans Parasite, une satire féroce, filmée comme un thriller.
Les films français présentés cette année ont eu les mérites de recevoir (presque) tous les faveurs du jury, du public et de la presse. Ladj Ly a secoué la Croisette dès le deuxième jour avec Les Misérables. Arnaud Desplechin, en changeant de registre et en filmant le réel, a séduit avec Roubaix, une lumière. Sibyl, le dernier film de Justine Triet, présenté en compétition vendredi soir a apporté un vent de fraîcheur sur la Croisette avec la formidable Virginie Efira, en psy-écrivain perdue. Céline Sciamma a présenté sans doute l’un des plus beaux films de la sélection, porté par magnifique duo d’actrices Noémie Merlant-Adèle Haenel : Portrait de la jeune fille en feu. L’histoire d’amour impossible entre deux jeunes femmes au XVIIIème siècle a touché les festivaliers. Seul Abdellatif Kechiche a divisé avec Mektoub my love : Intermezzo et ses interminables scènes en discothèque.
Cette édition a été marquée par plusieurs temps forts. Nous retiendrons dans nos mémoires l’émotion d’Alain Delon recevant sa Palme d’Or d’honneur, la venue de l’équipe du film de Once Upon a time in Hollywood avec Tarantino, Brad Pitt et Leonardo di Caprio attirant un monde fou aux pieds des marches ou dans le palais à leur arrivée à la conférence de presse, la présentation de Les plus belles années d’une vie de Claude Lelouch avec Jean-Louis Trintigant et Anouck Aimé, l’un des moments les plus forts de cette quinzaine, et dans un tout autre registre la masterclass de Sylvester Stallone, qui a fait salle comble.
Voici le palmarès de cette 72e édition :
Palme d’Or : Parasite de Bong Joon-Ho
Grand Prix : Atlantique de Mati Diop
Prix de la mise en scène : Le jeune Ahmed de Jean-Pierre et Luc Dardenne
Prix du jury ex aequo : Les misérables de Ladj Ly et Bacurau de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles
Prix d’interprétation masculine : Antonio Banderas dans Douleur et gloire de Pedro Almodovar
Prix d’interprétation féminine : Emily Beecham dans Little Joe de Jessica Hausner
Prix du scénario : Céline Sciamma pour Portrait de la jeune fille en feu
Mention spéciale : Elia Suleiman pour It must be heaven
Palme d’Or du court métrage : The distance between us and the sky de Vasilis Kekatos. Mention special du jury à Monstruo Dios s d’ Agustina San Martin
Caméra d’Or : Nuestras madres de Cesar Diaz (présenté à la Semaine de la Critique)