3 questions à… Bernard Agnès, auteur de Bracelets d’écume

Bernard Agnès est un auteur indépendant, épris de liberté et évoluant dans un univers poétique. Il est l’auteur de Bracelets d’écume et Marseille la Blanche, deux romans qu’il présentera au Salon des auteurs indépendants de Marseille le dimanche 27 octobre 2019 à la Fac de Droit sur la Canebière !

Bernard Agnes

Il a eu la gentillesse de répondre aux 3 questions à… de la Rédaction Littérature de FranceNetInfos. Interview :

FranceNetInfos :  Bonjour Bernard, vous avez écrit deux romans : Marseille la Blanche, et Bracelets d’écume publiés chez Librinova, pouvez-vous nous raconter votre parcours de vie pour arriver à celui d’écrivain ?

Bernard Agnès : J’ai commencé à écrire à 20 ans, le 31 décembre 1968 à minuit. Imaginez un appartement glacial. C’était le soir du réveillon et nous étions seuls. La famille n’avait pas digéré notre faute. Nous étions le scandale dans la famille: on ne fait pas d’enfant sans être mariés, à 19ans, étudiants et sans emploi. «Que vont dire les voisins?…» Ce sont les premiers mots de mon beau-père lorsque je l’ai rencontré. Alors personne ne nous avait invités ce soir-là.
J’étais seul dans le living. Dans la chambre à côté dormait un bébé de quelques mois, mon fils et, à côté de lui, ma femme. Je me demandais si elle dormait aussi, mais j’en doutais. Elle venait de tenir la promesse faite à ma mère: me révéler un secret qu’elle n’avait jamais osé me dire.
Pendant la guerre d’Indochine, mon père avait connu plusieurs femmes et laissé là-bas 4 enfants, des garçons et des filles. Aujourd’hui, l’Indochine était devenue le Viêt-Nam, il pleuvait des bombes sur mes frères et mes sœurs et je ne pouvais rien faire pour eux. Ça me perturbait.
J’ai aussi réalisé pourquoi ma mère ne m’aimait pas et pourquoi j’avais tant de mal à l’aimer. Pendant toute ma vie j’avais vécu dans un monde imaginaire inventé par ma mère. J’ai compris aussi qu’il allait falloir me battre dans cette vie.
Deux choix s’offraient à moi&: abandonner mes études ou les continuer le plus longtemps possible car nous aurions des bourses pour vivre qui ne nous seraient versées qu’une fois tous les trois mois. Pas d’allocations logement, pas d’allocations familiales, pas de chômage.
Pour vivre l’été, il nous faudrait monter dans ma vieille 2CV de 1954 et partir loin vers le sud pour pouvoir vivre décemment. Quand on voyage aussi pauvrement, on fait des rencontres peu ordinaires. Parfois on rencontre des gens d’une générosité folle, parfois des gens très dangereux. Ce type de voyage dura jusqu’à mes 30 ans.
Quand les 12 coups de minuit ont sonné, je me suis mis à écrire. J’ai cessé à 6 heures du matin. J’avais écrit 6 nouvelles de fantastiques et de SF et j’avais attrapé la crève dans cet appartement glacé. Quand je me suis relu quelques années plus tard, j’ai réalisé que ces nouvelles étaient des cris de rage et de destruction.
La nouvelle que je préfère s’appelle «1er amour». Je l’ai glissé sous forme dialoguée dans «Bracelets d’écume». J’aime sa cruauté vertigineuse. Ensuite, il y a eu d’autres nouvelles, des poèmes, souvent écrits en classe, en même temps que mes élèves écrivaient les leurs, puis un roman: «La guerre inachevée». Mais je ne suis réellement entré en écriture qu’avec «Marseille La blanche» Écrit d’abord sous forme de scénario de cinéma, puis de pièce de théâtre, enfin, en synthèse, le roman.

Comment est né « Marseille La Blanche » ?
Je me comportais avec mes élèves, en dehors des heures de cours, plutôt en « grand frère ». Ils venaient souvent discuter, se confier à moi, ou me demander des conseils. Il n’est pas étonnant que Leila, une jeune algérienne de 16 ans soit venue me confier son histoire et me demander conseil. Sa mère voulait l’envoyer dans sa famille en Algérie car son beau-père s’intéressait d’un peu trop près à elle… Je l’ai aidée, soutenue et consolée… Les vacances venues elle est partie.
Mes discussions avec Leila m’ont fait réaliser ce qui a fait le fondement de ma psychologie. Le fait d’être né dans une famille pauvre et d’avoir fait des études a entraîné son corolaire : j’ai développé une mentalité d’immigré. Mes parents ne savaient à peu près ni lire ni écrire et moi j’ai fini avec un doctorat de 3ème cycle de théâtre. Dans aucun de mes milieux professionnels je me suis senti à ma place. Ce que j’avais vécu dans l’enfance et après… le hiatus était trop grand aussi bien avec le monde ouvrier qu’avec le monde enseignant.
En septembre de cette année-là, j’ai décidé d’écrire une pièce de théâtre à partir de l’histoire de Leila. Je l’appellerais « Iphigénie à Hippone ». J’avais écrit la 1ère scène qui figure dans le roman, quand une élève que je ne connaissais pas est venue me demander de rencontrer ses copains. Ils essayaient de faire un film et cherchaient un scénariste. C’est ainsi que j’ai rencontré Ahmed qui deviendra un des personnages principaux de « Marseille la Blanche ». Ahmed, le roi de la tchatche et des combines de toutes sortes. Un culot d’enfer, capable de se glisser partout. Ses copains ont assez rapidement déserté le navire devant l’ampleur du travail et je me suis retrouvé seul avec a femme et Ahmed pour continuer le projet. À partir de là les choses se sont accélérées et sont parties dans toutes les directions. La radio, le théâtre, le cinéma et le roman à partir de plusieurs manuscrits différents que j’écrivais sous toutes les formes. C’est devenu une odyssée folle qui a duré 3 ans.
Il ne m’est pas possible de tout raconter et d’entrer dans les détails. J’ai pris le parti de raconter l’interview sous une forme qui rappellera « MLB » (Marseille La Blanche).
Je rapporterai des souvenirs marquants, parfois directement, parfois en utilisant des avatars qui me serviront de porte-parole : j’ai choisi « Dieu, Shakespeare, Cervantès et moi ». Certains sujets touchent trop à l’intime et surtout j’ai envie d’apporter un peu d’humour et de fantaisie dans cet exercice que je souhaite atypique, ce qui correspond le mieux à ma personnalité et à mon inspiration.
Avant, 2 souvenirs avec Ahmed…
– Sa sœur, que je trouvais très belle et qu’il traitait à mon goût d’une manière trop intégriste. C’est elle, sans doute, qui m’a inspiré le personnage de Marie dans « Bracelets d’écume »…
– Notre voyage à Paris…
Il avait envoyé un exemplaire de la pièce « MLB » à Ariane Mnouchkine et, quelques jours plus tard, il lui a téléphoné et a réussi à se faire inviter à La Cartoucherie de Vincennes pour la 1ère du « Mahabharata ». (Elle appelait ainsi cette pièce dans l’intimité, mais le son vrai titre est « L’Indiade ou L’Inde de leurs rêves ».)
Je nous revois dans le quartier africain de Paris, dans un grand lit entre Ahmed d’un côté et un grand et très beau noir homosexuel de l’autre. Nous avons plaisanté toute la nuit. Ahmed pouvait être un merveilleux compagnon.
Tout s’est bien passé avec Ariane Mnouchkine…
Elle a aimé la pièce mais elle ne pouvait pas la monter car elle partait en tournée mondiale avec la sienne. Elle souhaitait me faire rencontrer Claude (Lelouch !…) mais il était encore pour 3 jours en Normandie, en tournage sur la suite de « Un Homme et une Femme ». Enfin, elle voulait engager Ahmed dans sa troupe, mais il a refusé : il ne supportait pas l’idée d’être dirigé par une femme… L’aventure ne faisait que commencer. Si vous voulez en connaître la suite cliquez sur les liens suivants…
Dieu, Shakespeare, Cervantès et moi :
Cinquième partie Sixième partie  Septième partie

Bracelets d’écume

Comment est né « Bracelets d’écume » ?
J’ai choisi comme avatar ma petite fille. Elle vous expliquera son origine mieux que moi.

MANON Post 1
Salut tous,
Moi, c’est Manon. Je suis la petite fille que vous voyez sur la couverture du roman « Bracelets d’écume ». C’est mon Papi qui l’a écrit…
Je cours… J’ai l’air heureuse… Peut-être que vous vous trompez !
Et si j’étais en train de fuir un bombardement ? …
Vous avez eu peur ? Je vous ai eu, hein ? Voyez, les images peuvent être trompeuses !…
Quand mon papi cherchait à illustrer la couverture de son roman, il est tombé sur cette photo. Ça lui a rappelé une affiche qu’il avait vue dans une rue à Syracuse, en Sicile. C’était une petite fille, comme moi, qui courait en flambant sous les bombes au napalm.
Avec celle qui allait devenir ma mamie, il faisait le tour de l’Italie en stop. Ce jour-là, il a découvert qu’il y avait une guerre au Viêt-Nam et ce qu’était la guerre…
Mon papi, il dit qu’aujourd’hui, les premières victimes des guerres, c’est la population, c’est les innocents. Et qu’y a-t-il de plus innocent qu’un enfant ?
Tuer les enfants et les femmes ça sert à terroriser les populations. Et puis ça coûte moins cher que de lâcher des bombes ou de tirer des balles sur des soldats qui peuvent se défendre et vous tuer, vous.
Il a appris que pendant la guerre entre l’Irak et l’Iran, on se servait des enfants pour faire sauter des mines afin que les soldats puissent avancer !… Je crois que mon papi a raison. Les enfants et les femmes sont les premières victimes des guerres, aujourd’hui. Surtout les enfants… C’est pourquoi je lui ai donné l’autorisation d’utiliser ma photo pour faire la couverture et la publicité de son roman.
C’est plutôt un conte, comme « Le Petit Prince », mais un conte moderne. Alors les enfants dans la guerre continuent à être des enfants. Ils jouent, à la guerre. Ils cherchent l’amour, ils s’aiment…
La photo, c’était il y a 3 ans, au Portugal. C’est mon père qui l’a prise.
Aujourd’hui, j’ai 13 ans et je vais au collège. Il va falloir que je vous quitte pour aller au bahut sinon je vais être en retard et mon petit copain va être en colère. Ah ! Ces garçons !…

FNI :  Votre roman Bracelets d’écume montre un contraste permanent entre la réalité qui est très dure et la poésie avec laquelle cette réalité est racontée. Cette prouesse littéraire transporte le lecteur. Est-ce l’effet que vous désiriez obtenir ?
BA : On vit de plus en plus dans un monde d’images qui finit par nous faire perdre le contact avec la réalité. Sur les écrans de nos T.V, de nos smartphones, de nos tablettes, les images défilent, chacune chassant l’autre. Avec les selfies, on devient soi-même une image, un objet de spectacle. On voit défiler les images de visages de victimes de guerres, de catastrophes naturelles, de réfugiés sur des bateaux où des enfants naissent, ou dans des canots où des hommes, des femmes, des enfants finissent sur des plages, morts. Ces invités impromptus défilent sur nos écrans puis disparaissent sans qu’on sache qui ils sont. Le risque est de nous rendre insensibles aux malheurs des autres.
On n’arrive pas à accueillir des dizaines de milliers d’immigrés, bientôt il faudra faire face à des centaines de millions de réfugiés climatiques.
Dans mon roman « Bracelets d’écume » j’ai voulu faire « un arrêt sur image », créer des personnages, puis relancer la caméra et les suivre dans leur univers, pénétrer leurs désirs, leurs peurs, leur psychologie, devenir chacun d’entre eux. Créer un univers onirique où vivent, jouent, aiment et meurent des enfants.
En choisissant des enfants, je choisissais délibérément de relier cet univers à la poésie, celle de l’enfance où la vie est plus souvent rêvée que vécue. En tout cas c’est ainsi qu’a été la mienne. Je ne voulais pas tomber dans le reportage ou le misérabilisme moralisateur.
Pour répondre à cette question, oui, j’ai voulu que cette réalité très dure soit sublimée par une poésie enfantine. Mais dans l’écriture il y a une part d’irrationnel, d’un peu magique, et au fil des mots, elle devient automatique, incontrôlée.
Devant la feuille blanche, je m’imprègne d’abord du décor, puis je m’efforce d’entrer en empathie avec chacun des personnages. Quand l’alchimie a opéré, je lance le récit et le dialogue. Très vite les personnages me précèdent et je les suis, les laissant libres de vivre leur vie. Je n’interviens que lorsqu’ils prennent une voie qui m’éloignerait trop de mes propos. Je l’ai déjà dit quelque part, je suis le chien de berger de mes personnages.
Je pense en images. Les mots sont pour moi une seconde langue. Traduire mes images en mots, contribue peut-être aussi à créer un univers poétique.
Il y a donc au départ une volonté délibérée, sublimée ensuite par un phénomène incontrôlable. Appelons ça « la magie de l’écriture ».
Salon du livre des auteurs indépendants

FNI : Vous êtes un auteur indépendant, vos livres sont publiés chez Librinova, est-ce un choix de votre part ?

BA : Je n’ai pas choisi. La maison d’édition Fleuve a aimé le roman mais ne pouvait pas me publier « actuellement »… Elle m’a conseillé de l’envoyer à Librinova, plateforme d’auto-édition, avec un code Fleuve, à faire valoir pour suivre mes ventes et mes publications.L’auto-édition donne la liberté de garder ses droits d’auteur, la liberté de faire ses promos, ses choix, faire des connaissances car on s’inscrit dans des sites, on partage, on échange. Ce qui occupe, mais parfois trop…

Cette liberté se paye par le temps passé à essayer de se faire connaître par des posts humoristiques, intéressants, se faire lire et apprécier… Mais, nombreux dans ce cas, on obtient très aléatoirement des ventes. Ce serait utopique de penser en vivre, en tout cas c’est rare.

Pourtant écrire est un plaisir, un plaisir à partager avec ses lecteurs … Je souhaite le partager avec les visiteurs, au Salon du livre des Auteurs Indépendants-Marseille le 27 octobre au 110 La Canebière dans les locaux de la Faculté de droit de 10 heures à 17 heures.

On trouve mes deux romans en numérique et en papier broché sur Amazon et sur la Fnac, sur commande ainsi que dans 5000 librairies.

https://www.librinova.com/points-vente

https://www.librinova.com/librairie/bernard-agnes/marseille-la-blanche

https://www.librinova.com/librairie/bernard-agnes/bracelets-d-ecume

A propos alissash

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