Festival de Cannes J10 : Kore-Eda et Lukas Dhont émeuvent la Croisette

Au Festival de Cannes, les bonnes surprises arrivent souvent dans les derniers jours. C’est ce qui s’est produit jeudi avec la présentation de Broker de Kore-Eda et Close de Lukas Dhont qui ont ému les festivaliers et, espérons-le, le jury.

Après sa Palme d’Or en 2018 avec Une affaire de famille, le réalisateur japonais Hirokazu Kore-Eda était de retour en compétition avec un film tourné en Corée du Sud, Broker. Dans la veine de ses précédents films, il aborde ses thèmes de prédilection : la famille, l’enfance, l’adoption. Le film commence avec une scène glaçante : sous la pluie, une jeune femme dépose un bébé dans une boîte à bébés. Il est récupéré par deux hommes (dont Song Kang-Ho, l’acteur de Parasite), qui cherchent à le faire adopter en toute illégalité. Or, la jeune mère, un peu perdue, avait écrit sur un bout de papier qu’elle reviendrait chercher le nouveau-né. Le film prend alors des allures de road-movie. Les trois personnages partent, en quête de parents adoptifs, accompagnés d’un enfant, issu d’un orphelinat. Ils sont poursuivis par deux policières qui veulent les prendre en flagrant délit, d’autant plus que la jeune mère est une prostituée qui a tué le père de son enfant. Avec simplicité et pudeur, le cinéaste japonais fait surgir le comique dans des situations proches du tragique. Que va devenir ce bébé auquel, finalement, tous les personnages finissent par s’attacher ? Encore une fois, comme dans Une affaire de famille qui lui avait valu la Palme d’Or, Kore-Eda nous pousse à nous interroger sur la notion de famille. Est-elle celle d’où l’on vient ou bien celle que l’on s’est créée ? Les personnages de Broker, intitulé en français Les bonnes étoiles, ont tous quelque chose à se reprocher. Ils sont capables de bonté, mais sans respecter forcément la légalité. Sans en faire trop, le réalisateur japonais nous touche en plein coeur. Nous sous souviendrons longtemps de ces scènes dans la grande roue à la fête foraine, où les personnages se confient avec pudeur. C’est ça le cinéma de Kore-Eda. Le jury y sera-t-il à nouveau sensible, comme en 2018 ?

Avec Close, le jeune réalisateur Lukas Dhont a bouleversé les spectateurs du Grand Théâtre Lumière qui lui ont réservé une véritable ovation. En 2018, alors que Kore-Eda remportait la Palme d’Or, il repartait avec la Caméra d’Or pour son très beau Girl. Cette année, il a fait son entrée en compétition officielle avec un film riche en émotions. Lukas Dhont évoque les troubles de l’adolescence comme peu de réalisateurs y parviennent. Close s’ouvre sur deux jeunes adolescents, unis par une amitié fusionnelle, voire amoureuse. Ils font des balades en vélo, jouent aux chevaliers, dorment ensemble. L’un fait du hockey sur glace tandis que l’autre est musicien. A la rentrée, ils se retrouvent dans la même classe mais, très vite, leur amitié va susciter des interrogations et ils vont faire l’objet de remarques. Les enfants sont impitoyables entre eux ; c’est bien connu. On leur demande même s’ils sont en couple. Alors, l’un, sensible aux critiques, va se détacher peu à peu de l’autre, jusqu’à ce qu’un drame survienne. Comment un jeune adolescent peut-il survivre quand son copain, plus que son frère, n’est plus là, d’autant plus lorsqu’il est en rongé par la culpabilité ? Les deux garçons sont formidables. Eden Dambrine, qui incarne cet adolescent dévasté est une véritable révélation. Il mériterait le prix d’interprétation. Avec un tel sujet, Lukas Dhont aurait pu sombrer dans le pathos. Certes, les personnages et les spectateurs pleurent beaucoup pendant le film, mais le réalisateur belge parvient à éviter les écueils dans lesquels il aurait pu tomber. Emilie Dequenne, qui incarne la mère du jeune Rémi est déchirante, dans une scène finale qui a ému tout le festival. Close n’aura peut-être pas la palme d’Or mais il a celle du public. Jeudi, tous les spectateurs parlaient du film, souvent les yeux embués de larmes.

Dans une tout autre registre, nous avons découvert Pacifiction, le nouveau film du cinéaste catalan, Albert Serra. Pendant près de trois heures, Benoît Magimel est le Haut-commissaire de la République de Tahiti. Il est de tous les plans, vêtu d’un costume blanc. Il parle beaucoup, à une table officielle, en discothèque…Le film en a dérouté plus d’un. Il faut bien avouer qu’à la fin de la projection, la salle était loin d’être pleine. Quand certains témoignent un très grand enthousiasme et espèrent voir le film récompensé, d’autres, déroutés par tant de loghorrées, sont partis bien avant la fin du film. Reste à savoir l’avis de Vincent Lindon et de son jury samedi soir.

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