Un sacré tour de « passe-passe » pour Martine Lombard

La maison Médiapop éditions est une structure française qui s’est lancée dans la publication de livres diversifiés en 2011, avec une collection d’ouvrages réellement différents les uns des autres. Leur catalogue est vraiment varié et se veut particulièrement éclectique. Les sujets traités ne se ressemblent pas, car le message est clair : donner la parole aux artistes qui présentent des textes hors des sentiers battus.Ce recueil regroupe treize nouvelles, portées sous la plume de son auteure, Martine Lombard, née en Allemagne. Ancienne étudiante de Berlin-Est, elle a connu la séparation de cet État en deux. Aujourd’hui résidente de la ville de Strasbourg, la créatrice est également interprète et écrivaine. Elle se lance dans la présentation de son premier livre, « Passe-passe » rédigé en langue française, en 2021. Partagée entre ces deux pays, l’influence des deux nations est un euphémisme. Serait-ce même l’origine de ce titre qu’est « Passe-passe » ?

Passe-passe, un recueil de Martine Lombard

Tout écrit s’imprègne de son créateur, ici créatrice. Baladée entre Dresde, Paris et Bruxelles, Martine Lombard souhaite exposer différents tableaux qui ont pour dénominateur commun la volonté de s’en sortir « par une pirouette », lors d’une période charnière. La couverture représente une photographie sépia, sur laquelle on peut reconnaître l’auteure en personne, accompagnée de son amie Barbara. Publier un recueil de nouvelles de nos jours est souvent considéré comme un pari « risqué » pour les grandes maisons. Pourtant, cette tendance typique que l’on rattache surtout à cet « âge d’or » des nouvelles pourrait bien revenir au goût du jour…

Des récits courts s’imprègnent de l’esprit de Jean de La Fontaine, un des fondateurs du genre, qui s’inspire lui-même des bardes médiévaux. Parfois, cette histoire brève comprend une morale : dans le cas de la nouvelle au sens moderne, elle aussi symbolisée par la chute, un renversement de situation.

Passe-passe, écrit par Martine Lombard

Une plume captivante

Le lecteur est dupé, comme s’il était sous l’influence d’un auteur-magicien, qui par des mots et des tournures de phrases trompeuses, réussira à captiver un public jusqu’au bout du précipice… En passant de Nerval à Balzac, Conan Doyle et Asimov, l’exercice de la nouvelle est certes moins populaire que le roman feel-good ou le chick-lit, mais il permet d’aborder et traiter des sujets très précis, en un laps de temps serré et de ce fait, assure une découverte concise. Il est donc possible de lire ce recueil petit à petit, en espaçant chaque scène, à la manière d’un épisode d’une série d’anthologies contrairement au long roman traditionnel.

Des nouvelles inspirées de la vie réelle

Parmi les nouvelles marquantes, nous nous souvenons particulièrement de la première, portant le titre de « Vacances d’été », qui se déroule à la mer, exposant les différences générationnelles et le fossé entre les anciens, les parents et les jeunes, la vision du racisme… De nombreuses références historiques sont nécessaires pour comprendre le contexte, mais un peu de recherche permet d’en apprendre plus sur le contenu. Après tout, la lecture est également une occasion de se tirer de sa zone de confort. Cette longue nouvelle se réapproprie les codes du genre. Il n’est pas forcément question de retournement de situation théâtrale, puisque c’est bien la vraie vie qui a été le moteur, l’inspiration derrière ce vaste projet réussi.

« La Baumann » marque la quatrième nouvelle du recueil, suivant le quotidien d’un couple, très centré sur l’amour et l’incompréhension. L’originalité de la nouvelle repose encore une fois sur les racines du personnage de Véra, la « Baumann », originaire de la RFA. On y trouve même un tableau avec des traductions… Au cœur de la frustration, la fête et les émois se dérobent, générant le doute. Dans ses déplacements en train, elle cherche à se retrouver elle-même et à penser pour elle, à goûter à de nouveaux univers, mais est-elle vraiment prête ?

Une plume gorgée de poésie naturelle

En réalité, Martine Lombard exploite très souvent la thématique du voyage, parfois forcé, intérieur. L’expérience, le contact de l’autre et la rencontre forgent chaque personnage de ces petits contes empreints de réalisme. Difficile de croire que ces épisodes viennent bien de l’imagination seule pour cette auteure à l’histoire particulière. Il est donc facile de faire le parallèle entre l’artiste et son œuvre. Une expérience de lecture bouleversante, qui maintient intact de précieuses mémoires, sous une forme originale et une plume gorgée de poésie naturelle…

 

Le site de l’auteure : http://martine-lombard.com/

A propos Patrick Delort

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