Gérard Filoche : Interview Exclusive

Gérard_Filoche_au_Congrès_du_Parti_socialiste_en_2010Quitte à interviewer un homme politique autant se tourner vers ceux qui ne connaissent pas la langue de bois. Gérard Filoche en est un bel exemple. L’homme politique connu aussi pour avoir été inspecteur du travail et auteur de nombreux livres sur mai 68 et le droit du travail, nous a livré une interview exclusive pour France Net Infos. Alors que la crise n’en finit plus, on y évoque bien sûr la politique, mais aussi l’Europe, le chômage, les médias. Ce qui est sûr, c’est que l’homme n’a pas la langue dans sa poche.

Monsieur Filoche Bonjour. Aujourd’hui vous êtes plutôt mal vu au PS, pourtant, chose étrange, vous faîtes parti de ceux qui l’incarnent le mieux. Dans le même temps, vos détracteurs voudraient changer le nom du parti. C’est à ne plus rien y comprendre en politique. Rassurez-nous, vous avez encore des amis au PS ? Je n’ai pas le sentiment d’être « mal vu », comme vous le dites, dans mon parti, le PS. Jai reçu des milliers de messages de militants très encourageants : « tiens bon, ne cèdes pas, tu dis ce que nous pensons ». Cela s’est accéléré après mon tweet contre Total, et encore plus quand le Premier ministre a dit à la fois que « je ne méritais pas d’être membre du PS » et que “le PS ne devait plus s’appeler socialiste ». La conjugaison de ces propos démontre cruellement ce qui se passe. Nous avons un gouvernement qui quoiqu’issu du PS n’est pas socialiste, ne mène pas une politique de gauche, et le premier de ses membres est tellement pro-libéral, tellement avide de plaire au Medef plus qu’aux salariés, qu’il se lâche, qu’il ne se contrôle plus – ce qui finit même par agacer le Président qui a pourtant eu le grand tort de le nommer.

Je trouve que les partis politiques qui font parti de la démocratie, manquent souvent cruellement de démocratie entre eux. Me comprenez-vous ? C’est vrai hélas, pour le moment actuel au PS. Nous avons voté à l’unanimité un projet socialiste en 2011. Nous avons soutenu un candidat en 2012 qui a fait un grand discours au Bourget, lequel a mobilisé les rangs de toute la gauche pour gagner. Nous avons eu un congrès à Toulouse en octobre 2012 qui est allé plutôt dans le sens de cette victoire de mai-juin. Puis tout a tourné : dés le lendemain du congrès de Toulouse, le rapport Gallois, le choix de l’ANI du 11 janvier 2013, la loi honteuse sur les retraites, et enfin le choix de la « baisse du cout du travail » ont pris le contre-pied de tous les votes, de tous les espoirs des militants et des électeurs. A cause de cela on a connu un terrible désastre aux municipales des 23 et 30 mars. Au lieu de corriger, en nommant Valls, le président a accéléré cette politique devenue libérale. Cela a abouti a mettre Marine Le Pen en tête aux élections européennes le 25 mai. Au lieu de corriger, la politique libérale s’est accrue, jusqu’à mettre en œuvre un « budget grec » pour 2015. Deux ministres influents se sont opposés, ils ont été virés, et le gouvernement Valls, minoritaire, isolé dans le PS, isolé dans la gauche, isolé dans le pays, fonce quand même tout droit dans le mur. Dans le parti, le premier secrétaire Harlem Désir à été débarqué par le haut, sans ménagement, un autre Jean-Chirstophe Cambadélis, a été désigné par le haut sans être élu, et alors que les statuts prévoient  qu’un congrès doit se tenir à mi mandat, mi novembre 2014, d’en haut, ils veulent imposer qu’il ne se tienne qu’en 2016,  quand tout sera joué et trop tard pour modifier la ligne suivie. On peut dire que c’est une apocalypse de non démocratie.

De plus en plus de partis veulent de l’ouverture. Au final la politique ne défend plus d’idéaux et cela pousse à l’abstention. Lorsqu’elle en arrive là, à quoi sert t’elle ? Le combat entre droite et gauche est un combat entre forces sociales opposées, entre actionnariat et salariat. Il existe deux classes fondamentales, disons 10 % qui possèdent tout, et 90 % qui sont dominés. Les richesses n’ont jamais été aussi grandes et aussi concentrées, le salariat n’a jamais été aussi nombreux (93 % des actifs) et aussi exploité, il ne reçoit qu’une toute petite part des richesses qu’il produit. Les luttes politiques sont l’expression déformée du combat entre ces deux classes. Il faut comprendre et valoriser ce combat droite gauche. A droite, il existe un camp que les riches féodaux dirigent, et ils n’hésitent pas à spolier les électeurs qui se sont laissés abuser par lui : c’est ainsi que déçus, brulés par la crise, nombre de ces électeurs abusés se détournent de l’UMP classique et vont vers le FN. A gauche, il existe une large majorité, mais la politique des dirigeants de la majorité de la gauche, au lieu de combattre la finance, s’est alignée sur elle, ce qui déçoit ses électeurs qui se replient alors dans l’abstention. Ainsi le fossé se creuse entre les deux camps sur tous les sujets, sociaux et sociétaux, sans qu’une issue, pour le moment ne se dégage. Pareille issue d’ailleurs, a peu de chance de s’imposer sans un grand mouvement social : c’est quand il y a des luttes, des grèves, des occupations d’entreprises, que ça change en France, que le salariat l’emporte. C’est le travail des militants de préparer un moment comme celui là, qui redonne ses noblesses aux choix politiques.

Laissons le PS, et parlons de l’Europe. L’Europe a été créée après la seconde guerre mondiale. Le premier but était d’y instaurer la paix. Aujourd’hui on peut dire que cela a réussit. Pourtant là encore, on ne comprend plus très bien ce que l’on y fait. Je fais en effet parti d’une génération (né en 1973) à qui on a vanté l’Europe, les marchés ouverts, l’ouverture à la concurrence pour soit disant combattre le chômage. On nous disait lorsque nous étions ados, que nous ne connaîtrions pas le chômage. Ca a commencé en 1992 avec Maastricht. 20 ans après, le chômage est plus que présent en Europe. Est ce que l’on s’est foutu de nous ? Mais je suis de ceux qui crient « vive l’Europe ». Vive l’unité entre les peuples. Vive l’organisation sociale et démocratique de l’Europe pour le bien-être commun. Sans Europe unie tout serait encore pire, les libéraux qui la dirigent sont tellement barbares, égoïstes, avides de fric, qu’ils nous conduiraient à la guerre. Ils ont pris la main et sont majoritaires dans les 29 pays de l’UE : ils y mènent une politique de ponction massive des fruits du travail pour le compte du capital. Ils ont donné tout le pouvoir aux banques privées qu’ils alimentent inconditionnellement et celles-ci jouent à l’économie casino qui  nourrit la crise indéfiniment. L’oligarchie y trouve son compte tant qu’elle parvient à retirer les marrons du feu sans se brûler : elle alimente la fameuse « dette », en prend prétexte pour « réduire en priorité les déficits », et encore prétexte pour imposer des « réformes structurelles » lesquelles visent à casser tous les droits sociaux et du travail. Pour la finance c’est une martingale gagnante. Pour les peuples c’est une marche à l’enfer qui nourrit l’austérité, la récession, le chômage, les inégalités, la misère, les xénophobies, l’extrême droite ! L’accumulation de pillages, de misères a atteint un paroxysme en Grèce qui a servi de laboratoire et qui a été frappée comme par une guerre, par un sac… L’oligarchie grecque n’a jamais été aussi riche et le peuple grec jamais aussi maltraite avec 32 % de chômeurs, 52 % parmi les jeunes, des reculs de 30 à 40 % des salaires et retraites, etc. Il ont refait cela en Italie, en Espagne, au Portugal, en Irlande, et maintenant en France : alors que la France n’a jamais été aussi riche, il y existe 6,1 million de chômeurs, 10 millions de pauvres, et ils osent choisir de donner 41 milliards aux actionnaires et prendre 50 milliards aux besoins sociaux.  Tout ca au nom de « traités européens » (de Maastricht au TCE, de Lisbonne au TSCG)  catastrophiques qui prétendent imposer une règle d’or avec des déficits limités à 0, 5% ! Se moque t on de nous ? Non, « on » nous surexploite, pour garantir la rente et sucer le sang du travail. A faire cela, hélas, les libéraux européens mettent en cause l’idée même et l’avenir de l’Europe.

Aujourd’hui un bon nombre de personnes, de gauches et de droites, ne comprennent plus très bien l’Europe d’aujourd’hui. Cela nous amène à un retour au nationalisme, contraire à l’Europe. Hier on voulait s’ouvrir, aujourd’hui on veut se renfermer. Certains évoquent même l’idée de quitter l’Euro. Croyez-vous qu’il soit encore possible de changer la politique européenne ? Bien sur, qu’il est possible de faire changer la spirale infernale qui détruit l’Europe et ramène les conflits entre nations avec leurs cortèges de terreurs. Bien sur qu’il est possible de battre les droites fanatiquement libérales, et de changer les gauches qui capitulent jusque là devant elles. Les peuples ont les mêmes intérêts partout : relance des salaires, taxation des dividendes ! Si cela bouge dans un pays européen, l’interpénétration des questions économiques et sociales fera que ça bougera dans tous les pays, c’est une vague qui murit et qui est plus proche qu’on ne le croit, car les libéraux abusent tellement qu’ils suscitent des indignés partout, ca va se retourner !

Les mêmes politiciens qui ont défendu l’ouverture des marchés avec l’Europe, l’ouverture à la concurrence, nous disent maintenant qu’il faut acheter français, défendre les produits locaux. La conséquence de l’ouverture des marchés qui a délaissé les marchés locaux est une évidence dans la recherche des prix les moins élevés. N’est ce pas là aussi le rôle des politiciens de prévoir ? Bien sur, les propagandes des pseudo économistes libéraux sont atterrantes. Leurs solutions, toujours les mêmes, baisser le coût du travail, baisser les protections sociales, augmenter les « marges » des entreprises, échouent depuis trente ans… Le thatchérisme et son cortège de cynique de misère, est encore là, partout, dans les commissions de Bruxelles, au Parlement, dans la tête de ceux qui dirigent la BCE, chez le grand patronat de l’UNICE. Ils désarment nos industries, liquident nos productions, soumettent nos savoirs et technologies a des concurrences indues, a des dérégulations insensées, liquidatrices. Ils laissent partir Mittal ou Petroplus, se défaire Sanofi ou Alstom, reculer nos industries alimentaires aussi bien que notre culture : ils s’apprêtent même à signer un TAFTA, un « traité transatlantique » qui est à la fois une négation de l’Europe ( 29 pays « avalés » par 50 états américains) et un instrument de guerre mondiale demain contre la Chine et la Russie. Leur « mondialisation » est une mondialisation fanatique, totalitaire de la finance : 87 hommes détournent et possèdent ainsi 50 % des richesses de la planète alors qu’on pourrait éradiquer la faim et les pandémies…  Mais là aussi, il surgira des forces sociales capables de résister, de s’appuyer sur les intérêts communs des salariats, des travailleurs de tous les pays.

Les politiques donnent l’impression d’avoir de moins en moins de pouvoir. De nombreuses lois instaurées proviennent de l’Europe et les politiques semblent bien petits fassent à des entreprises du CAC40. Qui nous gouverne aujourd’hui ? Quel est le but de l’Europe d’aujourd’hui ?  Oui, ils ont inventé la thèse que l’économie obéit à des sortes de lois implacables que les humains ne sauraient modifier. C’est un mensonge qui ne sert que le pillage de la classe dominante, des 1 %. En fait, l’économie est évidemment faite et dominée par des hommes, par les sociétés qu’ils structurent, et l’intérêt des oligarchies qui tiennent le manche. En France il existe 1000 entreprises de plus de 1000 salariés qui font 50 % du Pib et décident de tout, à commencer par le sort des PME, PMI, ETI qui sont en dessous d’elles dans une chaîne de sous-traitance en cascade. Ces 1000 entreprises de plus de 1000 pompent l’état, et tous les salaires :  c‘est en imposant à leurs actionnaires une volonté publique, républicaine, qu’on peut redresser la situation, partager les richesses, et relancer l’économie. Cela exige un combiné de services publics,  de contrôles publics, réforme fiscale et reconstruction d’un droit du travail qui restaure du pouvoir aux salariés et à leurs syndicats. Le but dans chaque pays comme en Europe c’est d’enlever le pouvoir aux oligarchies, aux banques et de le rendre au peuple, au salariat qui produit les richesses et n’en a pas la part qu’il mérite.

Après une pause en août le chômage est reparti à la hausse. Les responsables politiques proposent des mesures pour lutter contre le chômage mais dans le même temps on remplace de plus en plus l’humain par des machines. Je pense aux caisses remplacées par des caisses automatiques dans les grandes surfaces mais aussi la Banque Postale, qui propose de nombreuses opérations sans passer par un guichet. On évoque même des machines dans l’avenir pour remplacer certaines interventions médicales. La société a été conçue ainsi, en nous faisant travailler pour gagner de l’argent. Mais en ne cessant de remplacer l’humain par des machines, comment peux t’on aboutir au plein emploi ? Ce n’est pas en s’opposant aux machines qu’on résoudra le chômage mais en partageant le temps de travail. Si en 70 ans, entre 1936 et 2002, on a pu produire plus, créer plus d’emplois, gagner plus, c’est en diminuant la durée du travail de 40 h à 35 h. Or si nous sommes en pleine crise, nous avons 6 millions de chômeurs, c’est parce que ce que ce processus est arrêté depuis dix ans : dans la vie réelle en France, la durée du travail est remontée, à 41 h. Or nous sommes en plein boom démographique , il existe 850 000 naissances par an depuis l’an 2000, cette jeunesse va vouloir travailler d’ici quelques années, c’est incontournable, il faut passer aux 30 h légales par semaine, sans perte de salaires. Ainsi les richesses seront redistribuées en même temps que le travail.

Dans le même temps, croyez vous qu’il soit possible de concilier croissance et écologie alors que nous sommes de plus en plus nombreux et que seules des mesures radicales comme la baisse de la production pourraient avoir un rôle sur l’environnement tout comme des déplacements moins nombreux ?  Bien sur je le crois. Il faut protéger la planète nous n’en avons qu’une. Mais pour sauver la banquise, il faut nous sauver des banquiers. Comme disait Chavez, « si le climat était une banque, il serait déjà sauvé ». Tout le système que nous subissons est hostile autant aux droits des humains qu’à l’environnement. L’égoïsme des intégristes libéraux est fanatique, rien ne les arrête, ils n’ont aucune compassion pour l’humain comme pour la nature, tant que nous ne seront pas à gauche plus forts qu’eux.  C’est pour cela qu’il faut une unité de la gauche rose rouge verte pour imposer une autre voie, une transition énergétique, une planification écologique, une relance sociale.

Aujourd’hui l’information est partout, mais elle ne rentre rarement dans le détail des choses, se laissant aller à l’énumération de faits, sans venir aux causes. Les vérités de l’instant ne sont pas toujours celles de demain. Quels sont selon vous aujourd’hui les meilleurs sources d’informations ? Internet permet à tous de parler à tous, bien sur et c’est une révolution encore incomprise, une conquête fabuleuse. Mais par tous les moyens l’oligarchie essaie de domestiquer, contrôler, étouffer ce moyen d’échange, de communication : elle serait capable de tout pour le faire taire en cas de soulèvement social massif. Les grands trust médiatiques achetés par les puissances du CAC 40 savent ce qu’ils font : ils gardent la main sur les puissantes télévisions, les plus gros journaux, les réseaux mondiaux, afin de réduire le filet d’eau des voix discordantes, et d’imposer le fleuve de leurs idéologies vassalisantes. Jusque là, ils y parviennent et font entrer dans la tête de millions de citoyens des idées fausses sur « la crise » « la dette » « les déficits », « l’Europe », la « mondialisation ». Soyons confiants, agissons, travaillons, militons, ces canulars voleront en éclats.

Dans le même temps, j’ai toujours ce sentiment que l’on préfère via la télévision notamment, distraire les gens, plutôt que de les informer. c’est même ancré à tort dans les cultures de chacun. Il suffit de voir les audiences d’une émission de divertissement et d’une émission culturelle pour s’en rendre compte. Que pensez-vous de cela ? Je viens de vous le dire, les plus puissants des médias sont là pour abrutir pas pour émanciper. Mais ils ne peuvent lutter contre le développement des esprits, la culture l’emporte. Quand il surgit des grands évènements, les idées percent en dépit des rédacteurs en chef formatés. En France, nous sommes le pays le plus politisé du monde, trois à quatre millions de militants sont en action : pour l’heure ils sont divisés, hésitants, mais vient le temps où ils sauront unir leur force. Quand il y a un mouvement social puissant des millions de citoyens, des salariés apprennent plus en trois jours qu’en trois ans…

La France est présente dans certains conflits, à l’exemple de la Syrie. Là aussi on a dû mal à comprendre le rôle de la France dans ce conflit. Que défendons-nous ? Contre qui sommes-nous ?Multiplier les interventions, les guerres en feignant de se donner le « beau » rôle de gendarme du monde coûtera, épuisera, puis échouera toujours. Le néo colonialisme, c’est encore que « les blancs » viennent « sauver les noirs », que les riches apportent la civilisation contre les barbares, que les religieux modérés s’opposent aux fanatiques intégristes, etc.. A chaque débarquement, à chaque bombardement, à chaque attaque de drone, les idéologies fanatiques trouvent matière à s’enraciner pour des décennies de plus. Les grands et petits impérialismes (La France en est un « petit ») tendent ainsi, toujours, à trouver des prétextes moraux, prétendument « civilisés » pour se manifester, s’imposer, intervenir, pacifier, occuper… et bien sur, se servir. Mais cela ne fait jamais avancer « le bien » contre les peuples eux-mêmes : les terribles crimes ainsi commis en Irak et en Afghanistan l’ont démontré. Le Moyen-Orient est ravagé depuis des décennies par les guerres suscitées par les grandes puissances. On peut aider les peuples, soutenir économiquement les forces sociales progressistes, mais cela ne peut se faire avec des visées néo colonialistes, seulement avec des visées émancipatrices : quelles légitimités ont les interventions militaires prétendument salvatrices, en Libye, en Syrie, au Mali, à Bagdad ou Kaboul de la part de ceux qui soutiennent la barbarie au Qatar ou a Ryad ?

Certains disent que les islamistes et notamment l’Etat Islamique ont longtemps été aidé par les américains dans les pays comme l’Afghanistan et qu’aujourd’hui cela se retourne contre eux. Etes-vous de cet avis ? Bien sur, pour aller vite,  Ben Laden était une créature – Frankeinstein – des USA, du temps de la guerre contre l’occupation russe de Kaboul. Et sur les 20 hommes qui ont fait le 11 septembre 2001, 18 étaient saoudiens. Et la famille Ben Laden est une puissance économique qui se nourrit du Djihad et tirent fortune des pèlerinages à la Mecque. Et l’Arabie saoudite, la pire des dictatures fanatique, intégriste, obscurantiste, barbare du monde, est suppôt notoire des USA et vice versa. J’ai écris une préface actualisée en 2003 à Marx et Engels sur leurs écrits des années 1850 sur l’Afghanistan : leurs analyses sur l’intervention et l’échec des britanniques dans ce pays au milieu du XIX e siècle était étonnamment valables.

On vient d’apprendre que le gaz va augmenter et dans le même temps, on nous annonce que l’ancien patron de GDF partirait avec 21 millions d’Euros de prime de retraite. Là encore, on se demande si on ne se fout pas de nous. Je ne parle pas de sa retraite alors que ce même Mestrallet figure à la 29ème position du classement des patrons les mieux payés en 2013. A l’heure où de nombreuses familles ont des difficultés à finir leur fin de mois, comment se fait t’il qu’il n’y ai pas d’austérité pour certains ? Je répète inlassablement – et cela me vaut naturellement des retours hostiles – la même chose depuis de longues années : quand un patron gagne 300 à 600 smic, ou 21 millions d’euros de « retraite chapeau » comme le dernier en date, Gérard Mestrallet, oui, c’est un voleur et un suceur de sang et de sueur !  Car ce n’est en aucun cas son travail qui lui apporte cette somme, c’est le vol du fruit du travail des autres. Nul ne gagne pareille somme par son mérite ! Nul n’arrache une telle somme sans violemment exploiter les autres.  Il ne faut pas laisser faire les suceurs de sang et de sueur, il faut au contraire limiter les revenus à 20 fois le smic comme le revendique la Confédération européenne des syndicats. Il faut des contreparties à la subordination des salariés… Ils n’aiment pas entendre ca.  Mais un patron qui ne paie pas les heures supplémentaires à ses salariés est un voleur, et il est d’autant plus critiquable, qu’il a autorité sur la personne qu’il vole… Il existe près d’un milliard d’heures supplémentaires impayées et c’est l’équivalent de 600 000 emplois. Les heures supplémentaires impayées, c’est un délit en droit pénal du travail,  9 plaintes sur 10 à l’inspection du travail sont causées par cela, et plus d’un patron sur deux ne les paient pas correctement. 500 familles qui se goinfrent de 440 milliards, ce n’est pas par leur travail c’est par le détournement du fruit du travail des autres..  1% qui possèdent 25 % du pays, ce n’est ni justice, ni droit, ni républicain, ni social, ni acceptable, 590 milliards d’avoirs français dans les paradis fiscaux alors qu’il y a 10 millions de pauvres c’est intolérable, 80 Milliards de fraude fiscale quand les petits salaires et les petites retraies sont bloquées, c’est provocation, entre 84 milliards de dividendes nets et 210 milliards de dividendes bruts, quand le gouvernement Valls retire 11 milliards aux collectivités locales, 9 milliards à la Sécu, c’est intolérable.

L’entretien des centrales coûtent de plus en plus cher. Etes-vous pour sortir du nucléaire ? Oui bien sur, mais dans une transition soignée, organisée, planifiée, progressive, vers d’autres énergies renouvelables, il y a tout un dessein social derrière cela. Encore faut il la encore arracher le pouvoir a ceux qui n’en feront rien.

Enfin, Mr Filoche, que diriez-vous à nos lecteurs, pour leur faire croire en la politique et à des lendemains plus positifs ? Militez ! Rien de grand ne s’est jamais fait dans le monde sans militant. A l’origine de tous les progrès sociaux, il y a un geste engagé. Ceux qui vont courageusement à contre courant arrivent souvent avant les autres, pourvu qu’ils aient une ambition sociale universelle. Non pas au nom d’une vocation avant-gardiste, mais du simple fait qu’ils expriment de façon vivante les aspirations de millions d’humains semblables à eux. Le monde entier se souvient de Spartakus mais pas du nom du gouverneur qui l’a supplicié.  La Commune de Paris est célèbre dans le monde entier, Thiers est révélé traître à son pays. Trotski fut paria et assassiné mais c’est le honteux Staline qui est banni par l’histoire. Guevara est célébré,  son assassin, méprisé. Le nom de Mandela l’a emporté sur celui du fondateur de l’apartheid. La force des militants c’est de renverser les exploitations et les oppressions, en partant de peu. Le courage et l’opiniâtreté sont leur lot. Humbles ou célèbres, ils comptent finalement toujours plus dans l’histoire des sociétés humaines que les César, les Empereurs, les Caudillo. Il y a toujours eu des Jacquou le croquant, des sans-culottes, des communards, des résistants, des syndicalistes, des indignés. Toutes celles et ceux qui luttent contre l’exploitation des humains par d’autres humains. Y aurait il de la démocratie sans résistants aux tyrannies ? Y aurait il des congés payés, des retraites, une sécurité sociale, des droits du travail sans syndicalistes ? Y aurait il des progrès de l’égalité entre sexes sans féministes ? Pour sauver la banquise il faut s’en prendre aux banquiers : mais pas sans écologistes convaincus. La paix n’est pas naturelle aux sociétés humaines sans action des antimilitaristes. Les gestes des militants sont simples mais ambitieux. Souvent, trop souvent ils apparaissent inefficaces, vains, répétitifs : et puis la parole est entendue, le tract est lu, le film est vu et compris, l’explosion sociale est là – comme en mai 68. Alors les militants font faire aux autres le chemin qu’ils ont eux mêmes parcouru : de l’éveil de quelques consciences à la conscience de masse : là ou il y a une volonté collective il y a un avenir collectif progressiste. Citons Maurice Kriegel Valrimont :  « Regardez en 34, les fascistes sont sur le point de prendre le pouvoir, manifestent, vont prendre l’assemblée. Si j’avais dit aux copains dans les manifs : dans deux ans, y aura le front populaire, on aura les congés payés et les 40h, ils auraient  rigolé !
Mais ça c’est rien ! Si en 1943, au moment où je me trouve dans une cellule aux cotés de mes amis résistants, si je leur avais dit : dans deux ans la France sera libérée, on instaurera les retraites et la sécurité sociale, ils m’auraient pris pour un fou !
Ce qui veut dire qu’en deux ans, beaucoup de choses peuvent se passer, simplement, il a fallu des hommes pour le vouloir, il a fallu des hommes pour s’organiser, pour que leurs volontés deviennent réalité. »

A propos Guillaume Joubert

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2 commentaires

  1. Très bonne interview de G Filoche dont je partage les idéaux et l’analyse politique .

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