La Vierge Noire et le Voyou de Xavier-Marie Garcette : une biographie de Francis Poulenc

En littérature, la biographie correspond à un ouvrage, dont le thème est l’histoire d’une vie. Il s’agit là d’un exercice qui ressemble au travail d’un historien. La biographie romancée avance des évènements réels, qui sont construits sous la forme d’un récit divertissant. Xavier-Marie Garcette est l’auteur du Marquis de Saint-Sozy et de Trévizac. Pour ces deux ouvrages, l’écrivain s’était démarqué par son sens du détail et son attrait pour l’Histoire et les grands noms. Ainsi, il a démontré à quel point il pouvait jouer avec les époques, adoptant une plume très crédible et qui correspondait à la période retranscrite. Cette année, la maison d’édition Des Auteurs Des Livres présente un livre bouleversant de poésie et qui donne envie d’en apprendre plus sur son sujet central, le musicien et pianiste français Francis Poulenc.

Le nouveau roman de Xavier-Marie Garcette

Il est important de constater que l’auteur délivre ici un ouvrage abordable pour tous, y compris celles et ceux qui ne connaissent pas vraiment l’artiste. Au-delà de la dimension strictement récréative de la lecture et découverte de cet ouvrage fort bien écrit, le texte assure une plongée réussie et crédible dans l’Histoire d’une France aisée, mais qui souffre parfois du « Mal du Siècle ». Entre désillusions et mutations d’un monde qui évolue très rapidement, chacun lutte pour se faire une place.

Chaque chapitre porte le nom d’une partition de Poulenc

Dans ce livre-hommage, Xavier Marie Garcette introduit chaque chapitre en lui donnant le nom d’une œuvre de Poulenc. Ce sont souvent des textes existants, comme les travaux d’Eluard. Par exemple, le chapitre 10 s’intitule « Main dominée par le cœur » — et fait référence à l’Occupation de la France pendant la Seconde Guerre mondiale.

Dans ce livre court de 166 pages, le lecteur se familiarise avec la personnalité détonante de Francis Poulenc. Ce dernier est un être empli de contradictions, brillant par ses talents de musicien, bloqué dans une souffrance qui lui est propre. Lui qui fréquente les bals dans les hôtels particuliers de Paris, tout le destine à une vie de dandy. Lui qui n’est pas à plaindre financièrement souffre « à crier… à mourir » comme l’on peut lire au troisième chapitre. Lorsqu’il demande la main de Raymonde, celle-ci décline l’offre. Le texte révèle son intimité débridée et surtout sa préférence pour les hommes. À la manière d’un bon nombre de ses contemporains, Francis était gay. Mais assumer son homosexualité dans un système qui la condamne fermement représente une belle leçon de courage. Dans ses passions et romances, Poulenc aime à en mourir. Il s’éprend tellement fort qu’il trouble ses partenaires, qui le trouvent trop enjoué. Si l’homosexualité est considérée comme un péché à l’Église, cela ne l’empêche pas de vivre une foi parfois transcendante…

La Vierge Noire, protectrice du musicien

Un lien mystique et unique unit la statue de Notre-Dame de Rocamadour et Francis Poulenc. Lorsqu’il s’y rend en 1936, ce dernier est bouleversé par cette statue, qui semble s’adresser directement à lui. Touché en plein cœur, il lui dédiera également une partition. L’opinion populaire voudrait que le catholicisme et l’homosexualité ne puissent cohabiter sous le même toit. Ce à quoi Claude Rostand pourrait répondre : « Il y a deux personnes chez Poulenc : il y a, si j’ose dire, du moine et du voyou ». C’est alors que le titre du roman prend tout son sens…

Loin de la guerre qui fait rage en 1940, le héros de l’intrigue se sent parfois coupable de mener une vie tranquille à Brive-la-Gaillarde, où il continue de composer et de pratiquer son art, qui est sans cesse valorisé, applaudi.

Dans son existence faite de voyages, Poulenc connaît la perte et le deuil. Petit à petit, une nostalgie s’installe. Il est question de défunts, mais aussi d’amours qui s’annoncent complexes. « Il n’y a pas d’amour heureux », peut-on lire dans les pages du livre. Cela se vérifie notamment lorsque son amant le plus emblématique décide de s’unir avec une femme. De son côté, Francis devient père, mais refuse de se marier avec la mère, avec qui il s’est enivré un soir. Après avoir trop bu, Freddy et l’artiste ont pratiqué le péché de chair. Une fille naîtra de cette brève relation sans sentiment. Reconnu parrain de la petite Marie-Ange. La marraine est Suzy Chanlaire, cousine de Richard — qui a été le premier amour de Francis Poulenc…

Un talent malmené par le syndrome de l’imposteur

Finalement, le Francis Poulenc dépeint par Xavier-Marie Garcette est un homme moderne, avant-gardiste, souvent égocentrique, mais désespérément humain. Dans cette volonté d’en faire trop, d’en faire plus, il est amené à fréquenter les plus hautes sphères de l’aristocratie. Il écrit notamment pour La Scala et tente même une tournée en Allemagne, alors qu’il est au plus mauvais point. De la première à la dernière page, le lecteur sera subjugué, admiratif — face à tant de dévouement pour son Art. Malgré cette tristesse qui l’assaille souvent, Poulenc donne l’image d’un homme dicté par ses pulsions et par son cœur.

L’ouvrage de Xavier-Marie Garcette donne vraiment envie de se pencher sur ce personnage, pour lequel le lecteur éprouvera une empathie quasi immédiate. Si la figure choquait à l’époque, elle peut aujourd’hui être célébrée et même honorée.

En France, le genre biographique est particulièrement apprécié. Avec un auteur bien renseigné et passionné par son sujet, tous les éléments sont réunis pour offrir une expérience de lecture immersive et délicieuse en tous points.

Site de l’auteur : https://xaviermarie-garcette.fr/

A propos Patrick Delort

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