“Bonnard, Pierre et Marthe” bientôt au cinéma : interview de Martin Provost et Cécile de France

Il y a quelques années, Martin Provost avait raconté le destin de l’artiste Séraphine de Senlis, une artiste du début du XXe siècle tombée dans l’oubli. Le film avait connu un beau succès à sa sortie en salles et avait obtenu pas moins de sept César, dont celui du meilleur film et de la meilleure actrice pour Yolande Moreau. Avec “Bonnard, Pierre et Marthe”, il s’intéresse cette fois à Pierre Bonnard et fait non seulement le portait du célèbre peintre mais aussi celui du couple qu’il formait avec Marthe, qui était à la fois sa muse et son épouse.  Un film à la fois lumineux, sensuel et émouvant, servi par deux magnifiques interprètes, Vincent Macaigne et Cécile de France.

En mai dernier, le film avait été présenté au Festival de Cannes hors compétition dans la section “Cannes Première”. Une évidence puisque Pierre Bonnard séjourna plusieurs années au Cannet, jusqu’à sa mort en 1947. Pour rendre hommage à cet artiste si attaché à la Côte d’Azur, la ville lui a d’ailleurs consacré un musée, inauguré en 2011. 

Après Cannes, Martin Provost et Cécile de France étaient de retour dans les Alpes-Maritimes, à Nice plus précisément, à l’occasion du festival Cinéroman. Dans un salon de l’hôtel Négresco, ils nous ont parlé de la genèse du film et de ce couple si mystérieux que formaient Pierre et Marthe Bonnard.

France Net Infos : Le film n’est pas que le portait de Pierre Bonnard. Il nous plonge au coeur du couple qu’il formait avec Marthe, son épouse et sa muse. Comment vous est venue cette idée ?

Martin Provost : Après “Séraphine”, la petite-nièce de Marthe Bonnard m’a contactée parce qu’elle voulait que je fasse un film sur sa grand-tante qui était également peintre. A l’époque, j’avais gentiment décliné. Puis, est arrivé le confinement. Il se trouve que j’habite à la campagne, à dix kilomètres de La Roulotte. Il faisait très beau à ce moment-là et chaque fois que j’ouvrais mes fenêtres, j’avais l’impression d’être dans un tableau de Bonnard. C’est un peintre que j’aime beaucoup. En fouillant dans ma bibliothèque, j’ai feuilleté un livre qui lui est était consacré et je suis tombé tout de suite sur le fameux “Déjeuner”, que j’avais chez moi lorsque j’étais enfant. En feuilletant le livre, je me suis rendu compte que le visage de Marthe était toujours indistinct avec ce regard flouté. Je me suis alors dit qu’il y avait quelque chose à faire mais que Marthe ne serait pas le centre de l’histoire. Ce serait le couple. Je suis parti de la vérité historique mais j’ai quand même osé faire certaines choses. Ce qui m’intéressait, c’était de les capter dans leur vie amoureuse, quotidienne, dans la construction de leur histoire. Pour moi, c’était plus important que la réalité historique.

France Net Infos : Cécile, aviez-vous entendu parler de Marthe Bonnard avant de faire le film ?

Cécile de France : Non, pas du tout ! Je l’ai découverte en lisant le scénario. Puis, Martin m’a passé plein de livres pour j’en sache davantage sur elle. C’est fascinant de voir les tableaux que lui a consacrés Bonnard. Dans les nus, on ne voit pas son visage mais dès qu’il est représenté, elle est soit tête baissé, soit de profil. Elle semble toujours enfermée dans un monde inaccessible et secret, complètement énigmatique. Il y avait tellement de choses à jouer dans ce personnage : son côté sauvage, le fait qu’elle soit connectée à la nature, son côté menaçant face à ses rivales amoureuses ou sociales, la maladie, la folie.

France Net Infos : Quelle est la partie que vous avez préféré interpréter ?

Cécile de France : C’est celle où elle commence à dessiner. Ca a été merveilleux de rentrer dans le personnage grâce aux séances que j’ai pu avoir avec Edith Baudrand, l’artiste qui a fait les peintures du film. A travers ses oeuvres, j’ai pu découvrir son intimité. Il y avait une exaltation de la couleur. Comme Pierre, elle peignait le quotidien, leurs animaux, un pot de fleurs… Je pense qu’elle peignait pour transcender sa douleur. Alors qu’elle était très malade, il y avait en elle une force et une vitalité impressionnantes. Elle savait ce qu’elle voulait et ce qu’elle ne voulait pas ! Elle s’est autorisée à s’offrir la vie qu’elle voulait en sortant de sa condition sociale.

France Net Infos : Dans le film, on voit Marthe à différents âges de sa vie. Cela a été compliqué pour vous ?

Cécile de France : C’était génial ! Je trouve que c’est très réussi dans le film. C’était pourtant très risqué ! Il faut, pour cela, faire confiance à un oeil extérieur, pour que ce soit juste. C’est un cadeau un tel personnage à interpréter ! Il y avait du plaisir à me dire que je devais être à sa hauteur.

“Bonnard, Pierre et Marthe” avec Vincent Macaigne, Cécile de France, Stacy Martin au cinéma le 10 janvier 2024. 

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