“Je ne suis pas un héros” au cinéma : rencontre avec Rudy Milstein et Isabelle Nanty

“Je ne suis pas un héros”, voilà un titre que l’on connaît bien et un refrain que l’on a souvent fredonné. Cette célèbre phrase ne sera bientôt plus seulement le titre de l’une des chansons les plus connues de Daniel Balavoine. Dans quelques jours sortira précisément ” Je ne suis pas un héros”, premier long métrage de Rudy Milstein que le public du Festival Cinéroman a pu découvrir en octobre dernier au Pathé Gare du Sud de Nice.

Cet homme, qui est loin d’être héroïque, c’est Louis (Vincent Dedienne). Dans le cabinet d’avocats où il travaille, il passe inaperçu et se montre un peu trop maladroit, “gentil” diraient certains de ses collègues. Pourtant, sa vie va changer quand, pensant être sérieusement malade, il avoue, un peu trop rapidement, être atteint d’un cancer. Ce n’est qu’une erreur de diagnostic. Pourtant, Louis continue à s’enfermer dans son mensonge. Le croyant malade, ses parents comme collègues de travail le regardent désormais différemment. Sa supérieure hiérarchique (Clémence Poésy) le traite avec égard, au point de l’utiliser dans une affaire délicate qu’a en charge le cabinet. Il va devoir attendrir la partie adversaire, des victimes d’une multinationale commercialisant des pesticides soupçonnés d’avoir provoqué des cancers. Louis va ainsi faire la connaissance d’Hélène (formidable Géraldine Nakache récompensée à juste titre à Cinéroman), une jeune plaignante, pleine d’énergie pour faire valoir ses droits et ceux des autres victimes.  Peu à peu, il gagne en assurance pour laisser place à un homme qui a de moins en moins de scrupules. A partir d’un sujet plutôt convenu, Rudy Milstein, que l’on retrouve aussi devant la caméra dans le rôle du voisin dépourvu d’émotions, a fait un joli film, attachant, à l’humour souvent absurde. A partir d’un sujet grave, il fait rire et, l’air de rien, émeut. Un pari risqué que ce jeune réalisateur a remporté haut la main ! 

Pour présenter le film au festival Cinéroman, Rudy Milstein était accompagné de la comédienne Isabelle Nanty, qui interprète la mère de Louis. Nous les avons rencontrés dans un salon de l’Hôtel Négresco.

France Net Infos : Pourquoi ce titre, “Je ne suis pas un héros” ?

Rudy Milstein : Louis est le personnage du film mais il n’est pas un héros. Il ment, il fait croire qu’il va défendre les malades alors qu’il ne pense qu’à lui et à sa carrière. Le film parle des apparences et du regard des autres. On cherche à montrer une bonne image de soi mais c’est loin d’être la vérité ! J’adore les livres de Dostoïevski parce qu’on y voit les contradictions de l’âme humaine. Ce sont des questions que je trouve passionnantes !

France Net Infos : Le point de départ du film est le cancer de Louis qui va s’avérer être une erreur de diagnostic…

Rudy Milstein : Comme tout le monde, j’ai fréquenté des gens ayant eu un cancer. Certains d’entre eux en sont morts et d’autres s’en sont sortis. Mon frère a eu un cancer. J’ai accompagné ma grand-mère les deux dernières années de sa vie. Quand j’ai voulu parler du cancer dans ce film, c’était surtout pour me dire de me nettoyer de tous ces préjugés et de toutes ces réactions qu’on peut avoir quand quelqu’un nous annonce être atteint d’un cancer. C’était une forme de thérapie pour moi.

France Net Infos : Ce film est aussi un récit d’apprentissage. Louis, au début, est perçu comme quelqu’un de gentil et un peu transparent puis il change avec l’annonce de cette maladie…

Rudy Milstein : J’ai vraiment pensé la trajectoire de Louis comme quelqu’un qui fait sa crise d’ado à 32 ans. Il a toujours voulu faire plaisir à ses parents et n’a jamais remis en question ce qu’on lui a dit de faire. Il est devenu avocat comme ses parents. Au fur et à mesure, il va se libérer de tout ce qu’on lui a mis dans la tête et qu’il a toujours pris pour des vérités. A 32 ans, il s’assume enfin et va jusqu’à faire souffrir ses parents comme lors d’une crise d’ado.

France Net Infos : Isabelle, qu’est-ce qui vous a séduit dans le scénario ?

Isabelle Nanty : Je suis fière d’avoir joué dans ce film. J’ai toujours attendu avec impatience la sortie des films de Woody Allen et d’Agnès Jaoui. Maintenant, j’attendrai ceux de Rudy Milstein. Quand je l’ai vu en tant que spectatrice, je me suis dit qu’il était un metteur en scène avec un style nouveau. Il y a du relief dans ce qu’il fait. En plus, c’est un directeur d’acteur génial. Il crée sur place avec les acteurs. Je me suis laissée porter par lui. C’est très émouvant ce genre de rencontres. J’en ai fait deux ou trois dans ma vie.

France Net Infos : Vous incarnez la mère de Louis, qui n’est pas très tendre avec lui…

Isabelle Nanty : Elle est méchante. Je la trouve horrible ! Elle est frustrée et aigrie. Au quotidien, vivre avec quelqu’un comme elle, ça doit être horrible ! Tomber enceinte de son fils l’a empêchée d’avoir une grande carrière d’avocate. Elle l’a pris comme une punition.

Rudy Milstein : Je voulais qu’on comprenne le moteur de tous mes personnages. On comprend pourquoi elle est horrible et cruelle avec son fils. Elle a décidé de prendre le chemin de l’aigreur.

France Net Infos : Rudy, vous êtes aussi acteur dans le film. Vous interprétez un homme insensible, dépourvu d’émotions après un AVC…

Rudy Milstein : Pour le personnage principal, je suis parti de moi, quand j’étais adolescent et qu’on me disait que j’étais gentil. Je sentais bien que ce n’était pas un compliment. En grandissant, je me suis demandé quelle apparence il fallait prendre pour plaire. C’est très tentant de changer pour obtenir certaines choses. Ce sont ces questions qui m’ont accompagné pendant l’écriture. Je cherchais à créer le confident de Louis, avec une trajectoire à la fois originale et qui me permettait d’incarner ce trouble de l’émotion. Mon père est médecin donc je lui ai demandé si c’était possible de ne plus ressentir d’émotions après un AVC. Il m’a dit qu’il ne l’avait jamais vu mais il m’a donné son feu vert. Je me suis dit qu’il pourrait être un bon personnage de comédie.

“Je ne suis pas un héros” de Rudy Milstein avec Vincent Dedienne, Clémence Poésy, Géraldine Nakache, Isabelle Nanty au cinéma le 22 novembre

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