Julien Leclercq récidive ! Après « Chronique d’un salaud de patron » en 2013, voilà qu’il recommence en publiant un livre sous forme de récit, dévoilant ainsi à chacun le quotidien d’un patron de PME. Il semblerait donc que le temps n’arrange pas sa salauderie !
D’ailleurs, cet homme mérite-t-il vraiment l’adjectif apposé en couverture ?
Ne souffre-t-il pas de masochisme aigu pour se présenter ainsi ?
Bref, Julien Leclerq est-il véritablement un salaud ?
La réponse est oui. Indubitablement. C’est un salaud, il n’y a pas tromperie sur la marchandise et voilà pourquoi :
Tout d’abord, à peine la première page tournée, je découvre une dédicace fort sympathique laissée par le stylo de l’auteur. « Le salaud, me dis-je, il essaye déjà de m’amadouer. »
Je m’attaque au récit en commençant cette semaine dans la peau d’un patron par le… dimanche. Quoi !? Il bouscule déjà mes certitudes. La semaine ne débute-t-elle pas par le lundi, comme tout le monde ? Ces salauds de patrons n’ont-ils pas droit au repos, emportent-ils du travail à la maison ?
Je passe ensuite aux pages suivantes, égrène les journées, lundi (scène amusante avec la venue d’un représentant de la CFDT), mardi (Mélenchon dans le train, discussion sur la délocalisation en Pologne…), mercredi (Urssaf, RSI, arrivée au bureau, embrassades…)
Embrassades ? Je relis le passage : oui, « J’arrive au bureau, embrasse les personnes présentes. » Il y a pire, plus loin, le jeudi : « Nous nous prenons dans les bras, les bisous et câlins sont légion… ». Et le summum pour vendredi : « Apéro et grillades font partie de notre vie ».
C’est quoi ce management ! Moi je m’attendais à engueulades, mises à pied, chiffre d’affaire en hausse, mais baisse des salaires quand même, utilisation abusive des conventions de stage…
Au fur et à mesure que le récit se dévoile, que l’auteur raconte avec émotion les difficultés financières, les contrats perdus, les diminutions de salaire afin de sauver l’entreprise (le salaud a même baissé le sien, et en premier !), les péripéties administratives… on se rend compte que la vie d’un salaud n’est pas si facile (en plus avec une semaine à huit jours…). L’écriture est claire, les anecdotes souvent très drôles (les SMS insistants d’une jeune femme suite à un entretien d’embauche), et les propositions subliminales pour améliorer le quotidien des patrons, et donc des salariés, pertinentes.
Oui, monsieur Leclerq vous êtes un salaud. De ceux qui nous poussent à reconsidérer les choses, à brûler les images d’Épinal, à nous remettre en question et à nous repositionner sur la légende urbaine du « patron buvant le sang de ses employés ».
Vous êtes un salaud car lorsqu‘on referme votre livre, vous nous laissez seuls, honteux, avec notre erreur de jugement.Et plus que tout, vous faites balbutier la langue française. Elle se retourne sur elle-même, vérifie ses définitions, ouvre ses dictionnaires. Car dans aucun d’entre eux l’adjectif salaud n’est associé à sympathique.
Et à vous lire, on se dit que ces deux termes pourraient être synonymes .
P.S : en réponse au dimanche (le deuxième dans votre semaine de patron), le loir hiberne sept mois dans l’année.
Excellente chronique!! Merci pour cette lecture!