“La passion de Dodin Bouffant” de Tran Anh Hung : rencontre avec Benoît Magimel et Pierre Gagnaire

En 1993, Tran Anh Hung avait remporté la Caméra d’Or avec “L’odeur de la papaye verte”. Trente ans après, il était de retour au Festival de Cannes, en compétition officielle, avec “La passion de Dodin Bouffant”. Le jury lui a décerné le Prix de la mise en scène, une récompense amplement méritée pour ce très beau film plein de délicatesse porté par Benoît Magimel et Juliette Binoche qui n’avaient pas été réunis à l’écran depuis de nombreuses années.

Dans le film, il est question d’amour et de la passion pour la gastronomie. C’est bien pour cela que, comme un plat délicieux, il se déguste lentement, délicatement. L’histoire se déroule au XIXe siècle, en Anjou. Dodin Bouffant (Benoît Magimel) cuisine et savoure les mets avec amour. Il élabore des recettes qu’il réalise avec sa cuisinière Eugénie (Juliette Binoche). A ses côtés depuis vingt ans, elle le comprend instantanément. Un seul regard suffit. Est-elle plus qu’une cuisinière ? Pour lui, c’est évident. D’ailleurs, de temps et temps, elle lui laisse ouverte la porte de sa chambre. Il la demande régulièrement en mariage mais, le plus souvent, elle esquive la réponse. Chez Dodin Bouffant, la cuisine se cultive au quotidien, à l’image du lien – de l’amour –  qu’il a tissé avec Eugénie. Pendant tout le film, la caméra tourne autour d’eux détaillant le travail de leurs mains en train de préparer des mets raffinés pour les convives, ou le fameux pot-au-feu que les Américains ont repris pour donner en guise de titre au film. Après avoir séduit le jury du Festival de Cannes, “La passion de Dodin Bouffant” va-t-il conquérir Hollywood ? C’est en effet le film de Tran Anh Hung qui a été choisi pour représenter la France à la prochaine cérémonie des Oscars.

A l’occasion du festival Cinéroman qui s’est déroulé à Nice le mois dernier, nous avons pu rencontrer Benoît Magimel et Pierre Gagnaire, le fameux chef étoilé, conseiller culinaire du film. Avec enthousiasme et passion, ils nous ont parlé de “La passion de Dodin Bouffant”, qui sortira en salles le 8 novembre.

France Net Infos : Pierre, comment vous-êtes vous retrouvé conseiller culinaire sur ce film ?

Pierre Gagnaire : Ce film parle d’amour de la cuisine, de la beauté, de la nature, des mots. C’était un cadeau pour moi d’accompagner des gens que j’admire et que je respecte. Le couple que Tran Anh Hung forme avec sa femme est formidable. S’il n’avait pas fait ce film, il disparaissait. La vie tient à peu de choses… La première fois qu’il m’a parlé du film, c’était il y a six ans. Il était venu manger un pot-au-feu avec son épouse et il m’avait parlé du film qu’il préparait sur Dodin Bouffant. J’ai accepté immédiatement.

France Net Infos : Benoît, c’est votre premier film avec Tran Anh Hung. Quelles indications vous ont-ils données ?

Benoît Magimel : Il a un timbre délicat. Il s’exprime tellement bien quand il parle des gens qu’il aime. Ce film est, je pense, une déclaration d’amour à sa femme. L’important, c’était d’insuffler une énergie. Tout comptait dans ce film. La mise en scène était très précise. Il y avait beaucoup de mouvements. Au moment de lancer l’action, il fallait calmer le jeu, trouver une bonne énergie. Mon travail était de trouver ce ton qui fasse que ce soit léger. Tout le monde respectait le temps de chacun.

France Net Infos : Avez-vous été surpris que le film soit choisi pour représenter la France aux Oscars ?

Benoît Magimel : Je savais que c’était un film qui allait voyager. J’en étais sûr. Il y a une délicatesse et une beauté dans ce film. Tran Anh Hung et sa femme ont fait un travail magnifique. Il y a une musicalité dans ce film.

France Net Infos : La façon de cuisiner a-t-elle changé depuis Dodin Bouffant ?

Pierre Gagnaire : J’ai commencé très jeune, il y a cinquante-six ans. Les gestes en cuisine sont les mêmes aujourd’hui qu’il y a cinquante ans. La technologie n’est pas vraiment rentrée dans la cuisine. On continue à faire ce que faisait Dodin : couper, cuire, rôtir. Si le monde de la cuisine plaît tant aujourd’hui, c’est qu’il y a un rapport avec la réalité et que c’est une déclaration d’amour. Je le fais tous les jours dans mon métier. La cuisine, c’est que de l’amour. Un cuisinier, c’est quelqu’un de généreux. On s’investit beaucoup de façon affective. Cela se voit dans le film quand Dodin veut prouver son amour à Eugénie.

France Net Infos : Benoît, aimez-vous cuisiner ?

Benoît Magimel : J’aime cuisiner. Quand on cuisine pour les gens qu’on aime, ça change tout ! Quand on cuisine pour soi, on fait des choses simples et rapides. Cuisiner pour une femme, c’est une déclaration d’amour. Le film ne parle que d’amour !

France Net Infos : C’est ce que fait Dodin à Eugénie. Pour lui prouver son amour, il lui prépare de bons plats et ils cuisinent aussi ensemble…

Benoît Magimel : Eugénie et Dodin ont une relation très moderne. C’est elle qui insuffle cela. Elle a peur de s’installer. Ce sont deux personnes qui cherchent à se surprendre. D’ailleurs, Dodin est toujours en train de la chercher… C’est elle qui l’inspire et dès qu’il crée une recette, c’est à elle qu’il s’adresse.

A propos Laurence

A lire aussi

le-livre-qui-peut-lire-dans-ton-esprit-Grasset

Le livre qui peut lire dans ton esprit – Ed. Grasset

Le livre qui peut lire dans ton esprit est un album jeunesse fabuleux, de Marianna …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

WP Twitter Auto Publish Powered By : XYZScripts.com